mardi 21 juin 2011

Une héroïne sortie de l’ombre - Le courrier de l'Ouest

Christophe Carichon, professeur d’histoire-géo au lycée Jean-Bodin, consacre un livre émouvant à Agnès de Nanteuil, résistante méconnue morte à 22 ans.

Que reste-t-il d’Agnès de Nanteuil aujourd’hui ? Le nom de baptême de la 26e promotion d’élèves officiers de Coëtquidan, en 2002 ; et le souvenir d’un être lumineux pour ceux – ils sont de moins en moins nombreux – qui ont croisé le chemin de cette femme pas comme les autres. Née en 1922, morte en 1944, Agnès de Nanteuil appartenait à cette « armée des ombres » immortalisée par Joseph Kessel dans son magistral roman porté à l’écran par Jean-Pierre Melville avec Lino Ventura, Paul Meurisse et Simone Signoret.
Élevée en Bretagne dans une famille catholique et patriote, Agnès de Nanteuil s’est sentie, très tôt, portée par le besoin de servir les autres et de faire le bien autour de soi. Suivant l’exemple de sa mère, elle s’est donc naturellement engagée dans le combat contre l’occupant allemand. Pas dans le rôle d’un chef de réseau ni dans celui d’une espionne au charme vénéneux, mais dans celui, plus modeste mais tout aussi essentiel, d’un agent de liaison. Comme tous ceux qui parcouraient des kilomètres et franchissaient des barrages pour transmettre, au péril de leur vie, des messages dissimulés dans le cadre de leur bicyclette.
On sait aujourd’hui que l’espérance de vie de ces sans-grades de la guerre clandestine est allée décroissant au fil des années jusqu’à n’être plus que de quelques semaines dans les tout derniers temps de l’Occupation. Agnès de Nanteuil n’a pas échappée à cette impitoyable statistique. Dénoncée, arrêtée et torturée, elle a ensuite été déportée par le dernier convoi parti de Rennes, au début d’août 1944. Mais, blessée pendant le trajet, elle est morte après une longue agonie à Paray-le-Monial, le 13 août.

Agent de liaison
Le récit de ses derniers jours constitue la partie la plus forte et la plus émouvante du livre que Christophe Carichon, professeur d’histoire et géographie au lycée Jean Bodin, consacre à cette « vie offerte ». Quasiment heure après heure, il fait revivre l’effroyable voyage dans un wagon à bestiaux, où Agnès suscita jusqu’au bout par son courage et son entrain l’admiration de ses compagnes d’infortune, malgré la souffrance, la chaleur, la faim, la soif et la promiscuité.
« Ce qui m’a séduit, c’est sa simplicité, son don de soi complet. C’est une jeune fille qui ne laisse pas indifférent » explique l’enseignant, auteur par ailleurs d’une thèse de doctorat sur les scouts et les guides en Bretagne.
Parmi les personnes qui l’ont aidé à retracer le court mais exceptionnel destin d’Agnès de Nanteuil, Christophe Carichon se souvient particulièrement d’Armelle de la Motte. « C’est elle qui a pris la suite d’Agnès dans la résistance ; elle a de la famille à Angers ».
   
Jean-Charles STASI